Le business de la mort
Ma petit entreprise ne connaît pas la crise
A l’heure où l’économie n’est pas au mieux de sa forme, il y a un secteur qui ne connaîtra jamais la crise. Parce que chacun d’entre nous en sera client un jour. Athée, agnostique, catholique, musulman, juif, protestant, d’obédience orthodoxe ou hétérodoxe, tous réunis autour d’un même achat ultime : un cercueil. C’est probablement la société OGF, société implantée à Jussey, en Franche Comté, qui sera votre dernier fournisseur, celui de votre dernière demeure.
Ce business funèbre, c’est le métier d’Emmanuel Garret, directeur du site OGF de Jussey, dans le secteur depuis 26 ans. Mais ce n’est en rien un métier lugubre. Avec son accent franc-comtois aussi marqué que son sourire, il fait son métier en servant les morts, sans gravité ni légèreté. “Construire des cercueils, c’est un métier comme un autre” selon lui, la charge symbolique en plus. Dans l’usine presque aussi grande que le petit village de Jussey qui l’accueille, Emmanuel et le 140 collaborateurs travaillent à la réalisation des « boites » comme on les appellent ici.
Un cercueil qui ne s’improvise pas
Il est loin le temps où un croque-mort à la Lucky Luke venait prendre vos mesures, avant que vous preniez votre dernière bière. A l’heure des normes (la norme NF D80-001 pour les mordus du sujet), chaque cercueil doit répondre à plus de 25 tests de résistance, évitant de fâcheuses situations. Il faut que celui-ci soit résistant au poids, pour éviter que le défunt passe du trépas à la trappe, qu’il soit biodégradable, pour que les pissenlits puissent nourrir leurs racines, et qu’il brûle efficacement lors de crémation, vous assurant d’arriver “à point” pour vos invités. Si tout est affaire de normes, il y a de nombreux aménagements possibles : pour les proches, une petite fenêtre en plexiglas destinée à vous identifier lorsque vous êtes l’un des 1000 ressortissants étrangers qui nous quittent définitivement pour votre pays natal.
Les plus originaux et les artistes en herbe seront néanmoins déçus, car les formes sont contraintes : “on peut pas faire un cercueil en forme de bateau pour les passionnés de voile, c’est interdit” affirme Emmanuel Garret dans un sourire. Pour être original dans l’au-delà, les options sont limitées : le choix du bois, difficile à différencier sans être botaniste ou forestier : chêne, hêtre ou peuplier. On peut faire varier le couvercle, plat ou bombé, dit “à la parisienne”. Mais nouveauté, le défunt prévoyant pourra mettre un peu de gaité lors de cérémonies trop compassées, en choisissant parmi 220 coloris. “On n’échappe pas à la mode, même dans ce métier”, note Emmanuel Garret. Pour vous accueillir pour votre dernier sommeil, il sera possible de choisir du rose fushia, jaune canari, violet parme, multicolore, les couleurs de votre club de foot préféré, ou encore bleu-blanc-rouge si vous souhaitez partir en bon français.
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